Des Bandeaux pour Baro
PAR Midi Olympique
Le 28 Juin 2017
S'ils ont perdu leur deuxième test-match, les Barbarians ont renvoyé une image forte : celle d'un groupe uni par la pensée avec Alexandre Barozzi, pilier gravement accidenté du rugby, auquel ils ont rendu hommage.
Par Léo Faure, envoyé spécial Midi-Olympique à Soweto
La première nuit, celle qui précédait la soirée de clôture de la tournée, s'est terminée samedi aux alentours de 22 h 30, dans les vestiaires de l'Orlando stadium de Soweto. Au chaud, loin de ce froid mordant qui avait giflé la pelouse du township le plus tristement célèbre d'Afrique du sud. Gilles Panzani, l'historique intendant du RCT, se lançait alors dans un haka diablement bien interprété, dernière performance d'un séjour riche en imitations. Mémorable. Avant cela, il y avait un chouette match de rugby. Les crochets de Louis Dupichot, les charges de Félix Lambey et la performance encore remarquée du Bordelais Marco Tauleigne. Les dernières apparitions sur un terrain d'Arnaud Mêla et Jean-Baptiste Péjoine, accompagnés à leur entrée seuls sur la pelouse par Fabrice Estebanez, qui pourrait suivre la même trajectoire s'il ne trouve pas un dernier contrat. Il y avait aussi eu les fulgurances incroyables du jeune arrière sud-africain Warrick Gelant (22 ans), le rugby dur de Ruan Botha sanctionné d'un carton rouge, l'arbitrage un rien compensatoire de l'arbitre local et la victoire nette des Emerging Springboks (Afrique du Sud A), clairement renforcés par rapport à la semaine dernière (48-28). « Les mecs se sont accrochés. Il y avait de la qualité en face, franchement. On prend des essais trop facilement sur des turnovers, un autre sur l'entame de deuxième période alors qu'il aurait fallu tenir quelques minutes avant de se retrouver à 15 contre 14. Cet essai nous fait mal, analysait après coup l'entraîneur Pierre Mignoni. Je me dis qu'on a surtout loupé le coche sur le premier match. Avec une touche de la qualité du deuxième test, je pense qu'il y avait la place- de gagner le premier. »
LACROIX, GUERRIER EN COSTARD
L'important, en fait, était ailleurs. Dès l’échauffement, on s'est pincé de voir la quasi-totalité des joueurs Barbarians arborer un bandeau « à l'ancienne ». Puis on a vite compris, se rappelant qu'au milieu d'eux il y avait Arnaud Mela et Arnaud Mignardi, deux Brivistes habitués de cet attribut. «Je le mets tous les matchs depuis quelques années, depuis que mon pote Alex Barozzi a eu son accident », raconte Mignardi. C'était en septembre 2013, lors d'un banal match de Fédérale 1 à Lannemezan. Depuis, l'ancien pilier briviste est dans un fauteuil roulant. « Ce bandeau, c'est en son honneur. Mais l'idée de tous le mettre vient de Fred Michalak » poursuit le trois-quarts centre corrézien. « Avant le match, il est venu me voir : « Pourquoi tu mets le bandeau ? » Je lui ai expliqué. Il m'a alors dit qu'il le mettrait aussi. Et Julien Dumora, qui était à côté, a embrayé : « Dans ce cas-là, on le met tous. » Au départ, ça devait être tous les trois-quarts. Et dans les vestiaires, quand les avants ont vu ça, ils ont fait pareil. » Même Gabriel Lacroix, pourtant blessé la semaine dernière, resté cette fois dans son costard-cravate mais qu'il avait surmonté d'une large bande de strap, semant un peu plus encore le trouble dans son épaisse crinière.
CHARVET : « ÇA REMPLACE TOUTES LES VICTOIRES »
Après le match, Mignardi a profité de son discours de « nouveau Baa-Baas » pour remercier ses coéquipiers de ce geste. « Arnaud a ému tout le monde avec son discours. Aujourd'hui, les joueurs sont souvent dans des cases, où ils n'ont plus à réfléchir pourquoi ils sont là, pourquoi ils jouent au rugby et quel sens ils y donnent. Ils en oublient même jusqu'à prendre du plaisir et à en donner. Les Barbarians servent à cela : à véhiculer, préserver et transmettre ces attitudes positives » applaudissait finalement Denis Charvet, manager de ces Barbarians. « Rien que pour ça, le geste qu'ils ont eu pour ce gamin, cette tournée est gagnée. Si on a pu lui mettre un peu de baume au cœur, si on a pu le rendre un peu plus fort encore, ça remplace toutes les victoires sur le terrain ». Ce n’est pas « Baro », présent vendredi soir devant sa télé, qui dira le contraire.