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18


MARS

L'interview Barbarian de Thomas Lombard
PAR Les Barbarians

Le 18 Mars 2021

  • Bonjour Thomas Lombard, vous avez été un grand joueur notamment du Stade Français et du Racing Metro, sélectionné à de nombreuses reprises avec le XV de France ainsi qu’avec les Barbarians français. Quel est votre meilleure souvenir durant votre carrière de joueur ?

Y’a pas de meilleures souvenirs, ce qu’ils restent et ce qu’ils durent, ce sont les amitiés avec les joueurs avec lesquels nous avons partagé des succès, des échecs, des moments de vie. Ca à une vraie valeur parce que ça ne s’éteint jamais, nous avons créé des liens indéfectibles dans le rugby.

Je dirais que c’est la plus belle des satisfactions et c'est ce que je retiens dans ma carrière car justement il y a ce côté intemporel, qui permet de garder, d’entretenir, tous les souvenirs de matchs et de victoires que nous avons pu partager.

Donc plutôt que de retenir un moment , une minute, une action, je suis plutôt quelqu’un qui est dans le concret, et pour moi le concret se sont les amitiés fortes que j’ai pu garder depuis le début de ma carrière il y a maintenant près de 25 ans.


  • Vous pouvez me donner quelques noms ?

Christophe Moni, Max Guazzini,… Ils sont très nombreux j’en vois certains régulièrement, d’autres moins. Mais le propre d’avoir participer ensemble à une aventure en équipe fait que nous avons pas besoin de nous voir ou de nous parler tout le temps, mais lorsque nous nous retrouvons la connexion ou reconnexion est instantanée. C’est très puissant comme sentiment, et avec tous les coéquipiers que j’ai pu rencontrer.

D’ailleurs nous avons l’occasion de nous retrouver régulièrement. Comme nous avons eu la chance de gagner des choses ensemble, c’est une raison supplémentaire de se voir. Même si théoriquement ça ne devrait pas exister comme ça. Nous avons des discussions WhatsApp (entre anciens joueurs) et de temps en temps il suffit que il y ait un post qui parte et c’est l’avalanche (de messages envoyés).


  • Vous êtes aujourd’hui directeur général du stade Français pouvez-vous nous expliquer en quoi consiste votre rôle au sein du club francilien ?

C’est un rôle qui est très élargi, et qui est très important.

C’est à la foi veiller sur l’organisation du sportif, qui est la vitrine du club. Il s’agit de la gestion de l’effectif de l’équipe première, les entraineurs, c’est un travail qui se fait en collaboration. Plus c’est fluide, plus ça va vite, mieux c’est. Il y a une relation de confiance, affective et amical car dans le staff y a des personnes que je connais très bien. Certains avec qui j’ai joué, d’autres que j’ai croisé pour diverses raisons et qui ont eux aussi porté les couleurs du Stade Français et cela est très important chez nous. Que ça soit l’entraineur en chef Gonzalo Quesada, ou Laurent Sempéré, Julien Arias, Christophe Moni, ils ont tous joué à Paris. Donc nous pouvons dire que ça nous permet de gagner du temps sur un certain nombre de choses, parce que cette culture et cette image du Stade Français nous la connaissons, nous l’avons en nous. Si nous sommes là aujourd’hui, ce n’est pas par hasard, c’est que nous avons envie de remettre cette culture d’actualité.

Le Rôle de Directeur Générale c’est aussi toute la partie administrative. Surtout que le Stade Français à la chance de bénéficier d’un stade formidable en plein Paris, dans un quartier avec un fort potentiel économique. Il nous faut faire vivre ce Stade Jean Bouin via les matchs de Rugby, mais aussi à l’aide de tous les évènements que nous pouvons organiser. Nous avons signé avec la mairie de Paris une convention d’occupation du stade qui nous amène à pouvoir utiliser Jean Bouin en dehors du Rugby. En temps hors Covid ce sont des concerts, des évènements pour les entreprises, des séminaires, tout un tas de choses ; et nous ne nous interdisons rien. Malheureusement la situation actuelle (Crise sanitaire liée à la Covid-19) fait que nous sommes obligés de tout revoir, même pas à la baisse, mais à zéro car nous ne pouvons strictement rien faire à part joué au Rugby. Ce qui est déjà une bonne chose pour que le Rugby ne se meurt pas, mais économiquement pour les clubs c’est intenable. Le lien social qui se faisait autour de la pratique du rugby avec les supporters, les entreprises,… il n’existe plus. Cette situation n’est pas un modèle économique. Nous avons besoin de rentrées d’argent. La situation elle impact tout le monde. Mais le monde du sport professionnel à fortiori quand il continue de se disputer, il est soumis à de rudes épreuves.


  • Vous êtes sélectionné pour votre première fois par le Barbarian Rugby Club en Juin 1999 pour affronter les barbarian Sud- Américain, qu’est-ce que cela représentait pour vous de devenir un baa-baas ?

C’est à la fois très simple et très difficile de résumer ce qu’est un barbarian. Quand on a la chance d’être appelé c’est évidemment une grande fierté, au même titre que l’Equipe de France, mais dans l’appel et dans le fait de devenir Barbarian, il y a autre chose que la simple performance sportive.

Être Barbarian c’est quelqu’un qui a un état d’esprit . J’ai pas envie de dire qui dénote car nous pourrions partir du principe que tous les joueurs de Rugby devrait avoir cet état d’esprit, mais tous les joueurs de Rugby n’ont pas eu la chance de devenir Barbarians. Cet état d’esprit c’est l’altruisme, le plaisir, la prise d’initiative sur le terrain, et essayer de retirer autre chose que les 80 minutes sur le terrain passées ensemble à combattre, mais qui permettent de tisser des liens. Je parlais tout à l’heure des discussions WhatsApp pour les joueurs du Stade Français. C’est la même chose pour les barbarian il y a des joueurs qui sont partis en tournée y 3,4, 5 ans ou plus et les fils WhatsApp sont toujours vivants, alors que les joueurs ne jouent pas dans les mêmes clubs et qu’ils ne se voient pas. Ça montre la force des liens qui peuvent se créer en l’espace de quelques minutes, quelques jours passés ensemble où nous allons pas faire forcément que du Rugby, mais où les adversaires d’une saison vont devenir des amis l’espace d’une respiration où y a pas d’argent, pas de contrainte particulière ; si ce n’est celle d’être bien ensemble, de rigoler, et de porter avec une certaine fierté les couleurs d’un club à part où nous avons eu le privilège d’être appelé.


  • Quel joueur du Barbarian Rugby Club vous a le plus marqué et pourquoi ?

Ils sont nombreux, mais si on s’intéresse à la genèse, à l’histoire des Barbarians il y a des joueurs iconiques qui ont marqué l’histoire. Les 2 premiers qui viennent instantanément se sont Jean-Pierre Rives et Serge Blanco. Personnellement Denis Charvet (qui est le joueur qui a le plus de matchs joués et de points marqués sous les couleurs des Barbarian) avec lequel j’ai eu la chance de jouer au Racing à la fin de sa carrière et au début de la mienne a été un joueur que j’admirais car il incarnait parfaitement cette légèreté, cette élégance (car c’était un beau joueur sur le terrain), l’art de l’attaque, et une vie qui ne s’arrêtait pas une fois le match terminé. Il fallait rester ensemble, il fallait parler et ce qu’il faisait que des moments ordinaires devenaient un peu extraordinaire, dans un contexte qui était complètement dénué de toute la pression qu’il pouvait y avoir, surtout dans le monde professionnel actuel (performance, récupération, sommeil, bien manger,…). C’était assez intéressant de pouvoir observer ça et bien évidemment ensuite de pouvoir y participer.


  • Quelle place les Barbarians doivent-ils occuper dans le Rugby moderne ? Ont-t-ils un rôle à jouer ?

Oui, ils ont un rôle à jouer, car les barbarians à un moment rappellent aux gens la réalité première du rugby et les valeurs de ce sport sur lesquels tout le monde communique beaucoup, comme la camaraderie, la convivialité, la simplicité et le fait d’être bien ensemble, et de faire que des gens qui ne sont pas forcément amenés à se connaître ou à jouer ensemble et qui ont parfois des antagonismes forts. Qui en l’espace de quelques jours deviennent des potes et je trouve cela très fort.

Et puis je crois aussi que le sport au départ c’est la passion, donc quand nous arrivons à enlever toutes les contraintes du professionnalisme et à faire pratiquer ce sport par des professionnels, mais dans un cadre qui n’est pas « professionnel », c’est très intéressant parce que nous revenons au fondement, et nous nous rendons compte que tous les joueurs, qu’ils soient de l’ancienne génération et qui donc ont été des amateurs, quand ils sont mis au contact des joueurs qui eux n’ont connu que le professionnalisme, ils reviennent tous presque instinctivement à ces valeurs primaires que nous (l’ancienne génération) nous avons connues.

Invariablement nous l’observons à chaque réunion, chaque match de préparation ou chaque tournée des barbarian. Au début nous avons toujours cette appréhension car les joueurs sont tellement sur des chemins balisés par les clubs que nous nous demandons si ça va matcher, mais à chaque fois ça passe comme une lettre à la poste. On fait pas forcément du rugby, mais on va faire du vélo, on va jouer aux boules, nous faisons tout ce qu’il nous passe par la tête et tout ce que nous avons envie de faire, tout en étant sérieux dans la préparation car y a un objectif final qui est le match. Mais ça c’est décuplé par l’envie de bien faire et de rendre ce qu’ils ont eu et que le Barbarians Rugby Club a mis à leur disposition, mais aussi pour laisser une trace car il n’y a pas beaucoup d’opportunité de jouer pour les barbarians. Donc quand il y en a une qui se présente il faut la prendre pour écrire un peu l’histoire et ça se sont des notions qui leur parlent.


  • Est-ce que c’est un peu une famille ?

Oui c’est une très grande famille où nous avons pas tous les mêmes avis, la même vision, les mêmes souvenirs et encore moins le même maillot. Mais l’espace d’un match, d’une semaine, nous partageons tout et nous avons des souvenirs qui sont intactes dans la durée. Par exemple y a 3 jours je recevais un SMS de Jérôme Filleul qui avait retrouvé dans ses photos, en rangeant sûrement, une photo de la tournée 99 avec les barbarians alors qu’il en a surement d’autres des photos vu que nous avons joué ensemble pendant des années au Stade Français. Je trouve que la symbolique est forte.


  • Pour vous, quelle anecdote de jeu ou de vie dans votre expérience BRC retenez-vous ?

La dernière anecdote elle se fait dans un match contre l’Australie à Bordeaux. Nous sommes à l’hôtel et nous décidons de partir, mais pas faire du rugby évidement. Nous partons en bateaux, malheureusement il fait pas beau, et nous allons au Cap Féret, parce que nous avons un ami qui nous y attend dans une cabane ostréicole pour manger des huîtres et faire du vélo. C’est marrant parce qu’il flottait, nous étions sur le bateau, il y a des mecs qui sont malades, des mecs qui aiment pas les huîtres, ça rigole, ça part un peu dans tous les sens. Nous arrivons à cette cabane. Nous y buvons des canons. Je suis certain que le moment que nous avons passé a été très fédérateur. Nous aurions pu aller nous entrainer deux fois et faire une séance le matin, aller à l’hôtel faire la sieste, et repartir à l’entrainement l’après-midi, ça aurait peut-être servi même à mieux préparer nos lancements de jeu. Mais en terme de cohésion sur un match qui était difficile face à un adversaire qui était lui dans des circuits très traditionnels de préparation. Je pense que cela nous a amené un supplément d’âme pour gagner le match. Y en a plein des anecdotes comme ça. Mais quelle équipe de Rugby dans un match hyper important va se permettre à 48h de la rencontre de faire un truc comme ça. Déjà que faire du vélo c’est risqué car si il y en a un qui tombe il peut se faire mal. Nous ne nous sommes même pas posés la question. Il y avait 50 vélos et les 50 mecs sont montés dessus. Ils roulaient dans tous les sens. C’est un très bon souvenir et c’est très à l’image de ce que peut représenter une préparation des Barbarians sur l’affect et l’émotion pour des joueurs professionnels.

C’est pas parce qu’on va s’entrainer 8h par jour que nous allons être meilleur. C’est un sport particulier le rugby. Bien sûr il faut s’entrainer, être en condition physique, avoir des repères communs, mais il faut aussi que les hommes aient envie de se faire mal les uns pour les autres. La cohésion et l’aspect mental sont déterminants, et ça nous le cultivons pas en faisant de la musculation ou du tableau noir. C’est un moyen alternatif de faire les choses, probablement que si les Barbarians avaient 25 matchs dans une saison à un moment nous nous essoufflerons , mais ça marche ponctuellement, et ça suffit parfaitement à notre bonheur, ça justifie notre existence, et prouve que les Barbarian même dans un monde qui se professionnalise de plus en plus, ils ont un rôle, et une légitimité. Les barbarians sont de formidables ambassadeur pour le Rugby. Aujourd’hui grâce à Serge Kampf et son réseau, beaucoup de gens connaissent cette équipe qui est un club très élitiste, très prisé. Même si peu de gens comprennent réellement comment ça fonctionne (ce qui est très bien), ils connaissent son histoire. C’est simple les Barbarians si quelqu’un veut venir dans le vestiaire il vient dans le vestiaire, les journalistes y viennent interviewer les joueurs. Il n’y a pas de conférence de presse. C’est un Rugby moderne pratiqué avec une mentalité d’amateur.


  • Joueur de Club, joueur du BRC, joueur du XV France, quelles différences ?

Joueurs de clubs c’est la répétition des efforts au quotidien, dans un environnement à haute pression qui prend en compte une donnée contractuelle. Puisque les joueurs sont dans des clubs où ils sont rémunérés, il y a donc un engagement de performance, il y a des règles qui sont strictes qui doivent être respectées , et c’est la compétition tous les dimanches. Quand ce n’est pas le championnat c’est la coupe d’Europe.

L’Equipe de France c’est le graal, c’est ponctuel et ça vient récompenser des bonnes performances individuelles en club. Tout Rugbyman qui se respecte à l’ambition de jouer pour son pays et c’est tout à fait normal.

Les Barbarian ça se situe entre les deux. C’est pas parce qu’on a pas été international qu’on en peut pas être appelé par les Barbarian et c’est pas parce qu’on est excellent avec son club qu’on sera forcément Barbarian. Ce sont d’autres critères de sélections.

Nous pouvons faire deux familles, avec la famille du club ou se situe à la marche supérieur l’Equipe de France et à côté celle des Barbarians qui gravite et qui est un peu entre les deux.

D’ailleurs c’est assez amusant car dernièrement nous nous sommes retrouvés dans des villes ou pays où été l’équipe de France (Nouvelle-Zélande, Afrique du Sud) et les joueurs du XV de France avait souvent tendance à vouloir nous appeler, essayer de venir passer un moment avec des copains à eux dans un cadre ou la pression du résultat et des entrainements était moins palpable.


Question Coupe du Monde :

  • Le Barbarian Rugby Club est devenu l’ambassadeur de la Coupe du Monde 2023 qui se déroulera en France, qu’attendez-vous de la compétition ?

Que la France y figure bien, nous avions pu nous rendre compte en 2017 de l’impact que pouvait donner une compétition réussi sur le Rugby Français, même si la France avait échoué en demi-finale. Nous avons malheureusement jamais gagné la CDM ,quand on sait que le pays qui y organise la compétition est une nation aussi respectable que la France, il endosse forcément un statut de favori. Nous avons en plus une génération merveilleuse qui est en train d’arriver et qui va faire les beaux jours de l’Equipe de France.

L’idée d’associer les Barbarian qui ont aussi un rayonnement mondial. Sur la culture et ce que représente les Barbarian c’est la possibilité d’agréger d’autres publics et d’y amener un état d’esprit un peu différent.


  • Les mesures prises pour endiguer l’épidémie ont éloigné durant presque toute l’année 2020 les supporters de leur équipe de cœur et ont fortement impacté les finances du Rugby Français. J’imagine que pour vous en tant que Directeur Général du Stade Français, il sera important de recréer ce lien. Comment vous y prendrez-vous ?

Le lien il est pas rompu, c’est juste une immense frustration qui malheureusement se répète dans le temps. Puisque chaque Directeur Général ou président de club attend à chaque annonce du gouvernement que la situation s’améliore et que le public puisse faire son retour dans les stades. Malheureusement depuis plus d’1 an et l’arrivée de l’épidémie chez nous, nous sommes forcés de constater que nous avons plus reculé qu’avancé. Il faut s’armer de patience mais aussi trouver des moyens alternatifs de communiquer, de garder du lien avec les supporters. J’évoquais tout à l’heure la cohésion sociale, il y a des personnes ici, supporters du Stade Français, qui ont très peu de moyen, qui mettent de l’argent pour s’offrir un abonnement, car c’est leur distraction, l’occasion pour eux de rencontrer du monde, de se retrouver dans ce qu’ils considèrent être la famille du Stade Français. Tout cela c’est interrompu il y a presque 1 an et ça commence à faire très long.

Oui il y a un vrai besoin de faire des choses, mais aujourd’hui il y a une sécurité sanitaire et une saleté de virus en face de nous. Que nous ne devons absolument pas négliger. Nous avons eu des joueurs qui ont été contaminé, et s’il y a bien une chose que nous devons éviter c’est bien de l’attraper. J’ai vu par où les joueurs sont passés, et pourtant ce sont des individus forts, jeunes, en bonnes santés. Il faut faire extrêmement attention. Nous, nous essayons de faire comme nous pouvons, il y a les aides de l’Etat qui vont arriver. C’est peut-être aussi une opportunité pour nous de changer un peu le modèle, revenir à des chiffres qui soient plus en rapport avec la réalité, ou en tout cas changer le sens du bateau car nous nous rendons compte que nous sommes très fragiles. Certains secteurs traversent plus ou moins bien la crise mais s’en sortent pas trop mal. Nous au bout de 3 mois sans rentrée d’argent nous étions à genoux. Il y a donc sans doute un certain nombre de choses qui sont à changer. Créer un fond de soutien pour les clubs en cas difficultés en fonction des maux qui pourraient nous toucher. Alerter les joueurs sur la fragilité des carrières de rugbymen et les réorienter sur un double projet qui soit un vrai double projet, avec un temps passé pour les études. Car malheureusement si leur carrière doit s’arrêter ou si leurs revenus doivent chuter pour des raisons diverses, ils auront toujours l’opportunité de faire autre chose. Ce sont tous ces sujets qui aujourd’hui sont mis sur la table et doivent nous alerter.


  • La Coupe du Monde peut-elle être le pilier pour relancer l’économie du Rugby Français et ramener les supporters dans les stades ?

Evidemment, c’est un pilier de développement, je crois qu’aujourd’hui il y a plein de secteurs dans lesquels le rugby est performant, mais aussi plein de secteurs dans lesquels le rugby doit progresser (la communication, le digital, le marketing), et nous pouvons faire bien mieux. Il y a des exemples dans des pays très proches et dans d’autres sports où ils sont bien en avance sur nous, et le rugby doit s’inspirer de cela. Le lien que nous devons créer et entretenir avec les entreprises , même si il y a toujours eu une relation forte entre le rugby et le monde de l’entreprise, mais nous devons pouvoir aller plus loin. Je pense que le modèle traditionnel des partenariats avec une entreprise qui vient donner un chèque pour apparaitre sur le maillot et peut être un peu arriver à ses limites et que nous devons l’élargir avec un spectre plus important (de l’intégration, faire des projet éducatifs , donner un élan plus vertueux en allant plus loin dans l’implication de tous les protagonistes.)


  • Au-delà des résultats du XV de France durant le mondial, comment la Coupe du Monde doit-elle faire pour créer un lien fort entre les supporters et les joueurs de Rugby ?

Il faut que nous restions accessible. Il faut se battre le plus possible contre le fonctionnement actuel où le rugbyman est moins accessible. Par exemple, les entrainements à huit clos. Quand vous avez des gamins le mercredi après-midi qui rêvent de venir voir s’entrainer Joris Segonds, Arthur Coville, ou d’autres joueurs du Stade Français, il ne faut pas qu’ils trouvent les portes fermées quand ils arrivent au stade. Nous avons rien à cacher nous ne sommes pas dans le nucléaire ou dans des laboratoires, il n’y a pas de secrets de fabrication. Donc il faut que nous restions accessible.

Je pense que l’une des clés du succès sera l’accessibilité du XV de France, toutes les opérations qui pourront être montées conjointement avec le XV de France. Je pense qu’il y aura une appétence très forte du public avec les raisons que nous connaissons. Les gens se mobilisent toujours pour une Coupe de Monde. Nous l’avons vu avec le Japon. Quand le Japon a été tiré pour accueillir la compétition les gens étaient négatifs, puis quand nous avons vu qu’en terme de revenu, de réussite, c’était l’une des plus belles Coupes du Monde de l’histoire. Alors qu’en passant derrière l’Angleterre ça ne devait pas être simple.

La prochaine étape c’est la France. 2007 avait été un formidable succès populaire, avec beaucoup de gens présents dans les stades. Et 2023 ca sera le même chose. En France nous avons le savoir-faire pour organiser les grands évènements sportifs.

Le lien avec les clubs, les opérations menées conjointement avec France 2023 qui seront nombreuses et qui ont déjà commencées à être mises en place. Il y a un calendrier très précis qui a été établi pour le lancement des opérations. Je trouve que ce qui est fait en ce moment est très porteur. Après nous avons France 2023, la FFR avec le monde amateur, et je pense qu’il faut y intégrer de manière forte le rugby professionnel. Il y a plein de choses que nous pouvons faire ensemble et aller plus loin que la mise à disposition des joueurs et le remerciement des clubs à la fin de la compétition. Nous devons pouvoir faire mieux et heureusement nous avons le temps d’y réfléchir.


  • Aujourd’hui, malgré les efforts de la FFR, le Rugby reste peu présent dans certaines régions de France. Selon-vous, la Coupe du Monde, grâce à l’organisation de match dans ces régions (Bretagne, Nord,…) pourra-t-elle aider à dynamiser le développement de la pratique ?

Le développement de la pratique il est fort, et le rugby est présent dans toutes les régions. Après ce que nous observons c’est une cartographie des clubs professionnels qui n’est pas forcément adéquate. La bretagne, le Nord, l’Est manquent de structures professionnelles, mais il y a des clubs.

Après nous savons qu’en fonction des régions il y a une culture locale sportive pour le football, pour le cyclisme, contre laquelle nous ne pourrons pas forcément nous battre. Mais c’est aussi le responsabilité de la LNR de favoriser l’essor des clubs qui ont de l’ambition et qui cherchent à se structurer pour devenir des clubs de rugby de l’élite. Il y a pas si longtemps de cela Lille était aux portes de la Pro D2. Même si finalement le projet a périclité, mais cela montre que c’est possible. Dans un premier temps il faudra peut-être dégager des aides et des subsides financiers pour pouvoir aider ces clubs à se développer.

Il faut peut-être aussi que le XV de France, qui est un formidable ambassadeur, se déplace un peu plus dans ces régions. Moi je trouve que le Stade de France c’est formidable, il y a aussi un contrat qui existe, mais l’équipe de France de rugby c’est l’équipe de tous les clubs de France et de tous les amoureux du rugby, et à ce titre peut-être 2 à 3 fois par an il faudrait que le XV de France s’exporte et aille jouer à Strasbourg, à Rennes ou à quimper. Pour récompenser ceux qui aiment le rugby et ne pas les obliger à toujours prendre un billet de train pour venir voir un match au stade de France, et puis je pense que c’est aussi une bonne manière d’amener la dynamique et créer des vocations.


  • Pour terminer cette interview j’aimerais savoir qu’elles sont vos projets pour le futur ?

Mes projets aujourd’hui sont uniquement basés sur le Stade Français, et particulièrement sur le projet éducatif qui me tient beaucoup à cœur. Je veux que dans les trois prochaines années nous ayons un modèle de fonctionnement beaucoup plus équilibré dans les centres de formation, entre le temps à pratiquer du rugby et les études, et qu’au Stade Français, et dans les autres clubs, nous ayons le projet de vie qui soit placé au même niveau que le projet sportif. Nous ne sommes pas là simplement pour décrocher au joueur un contrat et leur donner une parenthèse de 10 ans. Il y a aujourd’hui une casse sociale qui est énorme. Nous l’apercevons dans les centre de formation où 3-4 joueurs sur dix vont avoir l’opportunité de signer un contrat. Ça veut dire qu’il y en a entre 6 et 7 sur 10 que nous allons relâcher, alors que nous connaissons les sacrifices que ça représente d’intégrer un centre de formation.

Nous avons la chance à Paris d’avoir un réseau d’Universités, d’écoles et d’entreprises qui est colossal. Nous pouvons donc associer tous ces gens et les embarquer dans ce projet. Il y a aussi aujourd’hui une demande assez forte de l’éducation nationale pour mettre en place des formations pour les joueurs.

Aujourd’hui des écoles comme HEC, avec qui nous sommes partenaire, elles sont demandeurs car leur vision du sportif à changer et elles savent que leur état d’esprit, leur mentalité, leurs valeurs … permettent d’amener des choses différentes. Donc maintenant elles ont envie de faire des projets avec nous. Mais pour cela, il faut que la rigidité qui est du côté des clubs nous la cassions car ils ont peur que sans un certain nombre d’heures d’entrainements les joueurs ne deviennent de bons joueurs de rugby. Je ne suis pas d’accord avec ça car l’histoire a montré que pendant des années, nous avons formés de formidable joueurs de Rugby avec comme exemple des Dusautoir, Jauzion, Skrella,… qui ont fait de brillantes études ainsi que de formidables carrières de rugby. Et je ne pense pas qu’aujourd’hui ils seraient en déficit par rapport aux autres. C’est une question de volonté et de bon sens. C’est un projet majeur pour moi ici.

Après je souhaite très fortement redonner son lustre récent au Stade Français et d’en refaire l’un des clubs les plus populaires de France et l’un des plus performants.

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